© Satellite crane (« grue satellite »)


© Une des configurations du système de miroir hémisphérique utilisé pour la fabrication de To See

© La configuration de la caméra de la séquence de la bicyclette dans A Short History of the Wheel
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Scratch Focus / 7 août 2020

CENTRES DE GRAVITÉ : L'ŒUVRE DE TONY HILL

Scratch Focus est un espace de diffusion en ligne qui entend encourager l'exploration du catalogue de Light Cone, un fonds d'archive en évolution permanente qui est composé aujourd'hui d'environ 5500 films. Tous les mois, nous vous invitons à découvrir l'œuvre d'un·e cinéaste de la collection sur notre site.

Le travail de Tony Hill (Londres, 1946) peut être situé quelque part entre le film, la sculpture cinétique et la performance. Après avoir étudié d'abord l'architecture et ensuite la sculpture au St. Martin's College, Tony Hill a découvert le cinéma expérimental en assistant à des projections de la London Filmmakers' Co-operative (LFMC) dans les années 1970. Cet espace plein d'expérimentation, berceau du cinéma structurel britannique, l'a amené à concevoir la projection de films comme un « événement sculptural ».

Partant de cette idée, il a commencé par créer des environnements de projection semi-interactifs. Dans l'un de ses premiers projets, Floor Film (1975), le public devait se tenir sur un écran placé horizontalement, sur lequel étaient projetées, par le biais d'un miroir, les images d'autres personnes filmées d'en bas - ce qui amenait le public à ressentir une étrange ressemblance avec les personnes qu'il voyait dans le film.

Dans ses œuvres suivantes, Hill a continué à explorer des configurations inhabituelles, performatives et sculpturales pour le tournage et la projection. Le dispositif cinématographique standard, horizontal et bidimensionnel, ne lui convient pas : « Certains de mes films pourraient être montrés sens dessus dessous sans les changer de façon significative ». En effet, beaucoup de ses films mettent le monde à l'envers dans un désir de remettre en question les perceptions « normales » de l'espace et de la gravité, de présenter une vision enfantine du monde. Pour ce faire, Tony Hill construit des appareils complexes qui lui permettent de placer la caméra dans des situations apparemment impossibles et d'effectuer des mouvements qui semblent en contradiction avec les lois de la nature.

Il existe certainement une parenté entre le travail de Tony Hill et celui de certains de ses contemporains de la LFMC. Comme Chris Welsby, Tony Hill construit d'étranges appareils qui permettent d'enregistrer le paysage de manière inattendue grâce au regard inanimé de la caméra. On pourrait également établir des parallèles entre certaines de ses œuvres, notamment Downside Up (1984), et La Région Centrale (1971) de Michael Snow. Cependant, ce qui distingue le travail de Tony Hill est son attachement profond à la figure humaine : presque tous ses films comportent un élément de portrait. Grâce à la tension entre le regard humain et le regard mécanique, le portrait intime et la machine impersonnelle, ses films engendrent une expérience non seulement désorientante mais aussi parfois très émotionnelle.

C'est peut-être son intérêt pour filmer les autres qui l'a aussi mené à un grand nombre de collaborations. Parmi les plus récentes, on peut citer le projet Hotel Bardo (2018) de Wistanley Schtinter, qui a été réalisé dans le cadre d'Atelier 105, la résidence de post-production de Light Cone, et pour lequel Tony Hill a créé un dispositif de tournage sur mesure. Les machines de Tony Hill lui ont également donné l'occasion de travailler sur de nombreux projets commerciaux, comme, tout récemment, le clip vidéo A$AP Forever (2018) du rappeur A$AP Rocky.

FILMS EN LIGNE

DOWNSIDE UP
1984 / 16mm / couleur / sonore / 17' 32

« Un unique mouvement de caméra, sans cesse répété, observe et interroge plusieurs de nos modes de relation au sol. »
– T.H.

Pour ce film, Tony Hill a créé un appareil appelé « satellite crane » (« grue satellite »), conçu pour faire tourner la caméra autour d'un sujet. Les variations de vitesse dans la rotation de cet appareil lui permettent d'analyser le mouvement et les rapports entre verticalité et horizontalité.

DownsideUp

« Ici le mouvement est une parabole qui dévoile, découvre, enlace puis enlève ou emporte notre rapport au sol. C’est le regard d’une créature désincarnée, enfermée dans le Temps et condamnée à observer, comprendre, interroger puis cesser de comprendre et ainsi de suite, sans arrêt, l’étrange présence de ces animaux humains sur la Terre. Mais derrière l’apparente fluidité du mouvement c’est aussi une série de positions déterminées qui se déroule. À chaque nouvelle parabole, c’est un nouveau passage (d’une brièveté infinitésimale) par ces points stratégiques : sortir de terre, être au zénith, se renverser, retomber sur sa tête… Et dans cette série de positions il y en a une, toujours, qui se distingue très discrètement, à peine : c’est la position du regard humain. Elle est inévitablement traversée, à chaque fois, au premier tiers du parcours environ, la position du regard humain debout, le lieu de notre regard habituel, traversé, intégré à ce parcours seulement au passage, ramené à son peu de préséance sur l’arc-en-ciel infini des autres origines possibles du regard… »
– Tancrède Rivière


TO SEE
1982 / 16mm / couleur / sonore / 1E / 12' 10

« J'ai remarqué, quand j'ai commencé à faire des films, à quel point c'est un bon moyen de voir le monde autrement. J'ai continué à explorer les possibilités de ce moyen depuis, pour essayer de trouver de nouvelles perspectives sur le monde visuel "ordinaire". Pour échapper à notre perception "normale", j'ai construit de nombreux appareils. »
– T.H.


A SHORT HISTORY OF THE WHEEL
1992 / 16mm / couleur / sonore / 1' 14

« Petit cours pratique de relativité visuelle, sous forme d’un voyage spatio-temporel autour d’un objet millénaire : la roue. Du chariot à main à la diligence, puis au tracteur, à l’automobile et finalement, à l’ultime véhicule à roue : la bicyclette. »
– T.H.


HOLDING THE VIEWER
1993 / 16mm / couleur / sonore / 1' 25

« Un tour de montagne russe cinématographique aux mains d'un performeur qui tient littéralement le spectateur au bout d'un poteau. »
– T.H.


BOUNCE
2017 / Vidéo / couleur / sonore / 1' 05

« La possibilité de "chute libre" de haut en bas à partir d'un rebond est certainement l'un des principaux attraits de l'utilisation d'un trampoline. Ce film célèbre ce sentiment, à la fois d'utiliser et de défier la force de gravité. »
– T.H.


Light Cone distribue les films de Tony Hill, ils sont consultables ici.
Nous remercions à Tony Hill d'avoir répondu à nos questions et de nous avoir envoyé des photos de ses appareils.

PLUS D'INFORMATIONS

lieu Light Cone
157 rue de Crimée
75019 Paris
France
tel +33 (0)1 46 59 01 53
email lightcone@lightcone.org
lien en relation Tony Hill (site officiel)